Un mois après la terrible explosion qui a détruit le port de Beyrouth et qui a secoué toute la classe politique libanaise, Emmanuel Macron était de retour le 31 août pour faire un premier bilan avec les dirigeants libanais. La France et le Liban entretiennent des relations culturelles et politiques importantes en vertu de leur histoire. Alors que le mécontentement de la population libanaise est de plus en plus intense, que la crise économique s’aggrave et que les tensions politiques s’accentuent, le président français cherche à aider les Libanais à trouver des solutions concrètes.
Une “réforme” profonde et structurelle est nécessaire et pour cela il convient de parler avec toutes les parties concernées. Mais les efforts diplomatiques français au Liban ne font pas l’unanimité. Voici un résumé des articles publiés par la presse libanaise sur la deuxième visite du président Macron à Beyrouth :
Dans cet article publié par le journal Al-Akhbar, Mohammed Wahbah s’intéresse aux déclarations d’Emmanuel Macron au sujet de la nécessité de réformer le secteur banquier au Liban. Lors de sa première visite au Liban, il (Emmanuel Macron) était accompagné de deux Libanais: le banquier Samir Assaf et le négociant maritime Rudolf Saadeh. « La surveillance criminelle à la Banque du Liban, bien que nécessaire, ne conduira pas à un ajustement des politiques monétaires. Au contraire, elle donnera un nouveau souffle aux politiques précédentes qui donnaient la priorité aux forces financières dominantes, tout en ajoutant une atmosphère de concurrence et des slogans sur les filets de sécurité sociale. Telle est la logique de la politique néolibérale. Macron est l’un des derniers visages de cette logique » ajoute l’auteur.
Dans la dernière partie de l’article, l’auteur pose des questions au sujet d’une éventuelle coopération entre les banques centrales libanaise et française. « Quelles sont les expériences de la Banque centrale française en matière de contrôle pénal ? Zéro. La Banque centrale française travaille comme les autres banques centrales, elle élabore des politiques monétaires et les met en œuvre dans le cadre d’un ensemble d’objectifs qui ne sont pas liés à la fourniture de services extérieurs. Les banques centrales du monde entier ne sont pas connues pour avoir des services de contrôle pénal sur les comptes d’autres banques centrales. ».
Ce qui est évident, c’est qu’il est impossible d’atteindre la stabilité politique au Liban sans réformer son économie et son système bancaire. La question est la suivante : dans quelle mesure la France et les Français peuvent-ils aider les Libanais à aller dans cette direction ?
Dans cet article publié par Al-Awsat, Hussein Shobokshi analyse la stratégie moyen-orientale d’Emmanuel Macron. Selon l’auteur de l’article : « Macron semble se rendre compte qu’il est confronté à une opportunité historique avec le retrait de l’Amérique de la scène internationale, l’effondrement de l’OTAN et la fin prochaine du mandat de la chancelière allemande Angela Merkel. Cette scène serait l’occasion pour la France d’étendre son influence économique dans une région traditionnellement considérée comme sa sphère d’influence. L’objectif est ici de construire un axe politique et économique français sur le croissant iranien dans la région qui s’étend du Liban à l’Iran en passant par la Syrie et l’Irak. ». C’est également pour cette raison que la France souhaite garder l’accord nucléaire avec l’Iran en vie. En cas d’une victoire de Joe Biden à la prochaine élection présidentielle américaine, le président français aura le soutien de Washington dans ces démarches au Moyen-Orient. Selon l’auteur de l’article, Emmanuel Macron est conscient du rôle stratégique de l’Iran dans la région et c’est pour cette raison qu’il est en rupture avec l’administration Trump sur ces sujets.
Cependant, l’auteur de l’article n’hésite pas à critiquer les ambitions françaises dans la région : « Mais il existe aujourd’hui un “macronisme machiavélique” qui semble faire de l’objectif économique une justification de tous les moyens politiques qui placeront les peuples sous les chaînes de l’hégémonie sectaire au détriment de la liberté, de l’égalité et de la fraternité qui constituent l’épine dorsale du concept civil français. ».
Dans cet article publié par Aljoumhouria, l’auteur se concentre sur les efforts diplomatiques français pour unir les différents partis politiques libanais autour d’un projet de réformes structurelles. Notamment le dialogue entre Emmanuel Macron et le Hezbollah, allié de l’Iran, « le Hezbollah a-t-il une flexibilité interne pour saisir cette opportunité, se désengager financièrement et militairement du projet de révolution islamique iranienne… ».
Par la suite, l’auteur de l’article s’inquiète des ambitions françaises dans la région : « Ce qui est à craindre, c’est que le Liban ne revienne à une arène ouverte de conflit international… le pays se dirige vers de nouvelles guerres internes et des crises sans fin, dans lesquelles les seigneurs de la guerre retournent à leurs retraites sectaires, agents des intérêts des acteurs régionaux… et cela ne s’arrêtera pas avant la disparition du Liban que nous connaissons. ».
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